Marion Cornille vinifie cette année le Gewürztraminer en vin orange et fait donc entrer pour la première fois une quatrième couleur au Domaine Mas de Rey. Ce n’est pas la seule nouveauté puisque ce vin sera également élevé en amphore, une belle occasion de replonger en Antiquité.
« Ça a de la bouche ! On sent que ça va être riche et gourmand, je suis contente » s’enthousiaste Marion en goûtant le jus depuis la cuve dans laquelle le raisin a été entreposé il y a quelques jours. Cette année, elle a décidé de donner un nouvel élan au Gewürztraminer, un cépage planté depuis de nombreuses années au Domaine qui, selon elle, n’a pas encore été exploité à sa juste valeur. « On a de la chance d’avoir un Gewurz qui est très riche en belles aromatiques, il est temps de valoriser tout son potentiel« . Et pour cela, elle a décidé d’en faire un vin orange : un vin blanc vinifié comme un vin rouge.
Après les vendanges, le raisin est mis en cuve pour l’étape de macération à froid avec de légers remontages réguliers. « On essaie de trouver un équilibre dans l’extraction en gardant les arômes végétales, le vin est goûté tous les jours pour s’assurer que l’on va bien dans la bonne direction » explique Marion.
À cette étape de la vinification, les arômes de rose et de litchi sont déjà bien présentes et le jus commence à se colorer. L’extraction ajoute du caractère, mais il faut garder de la mesure et éviter d’apporter trop de tannins. On procède régulièrement au mouillage du chapeau pour éviter que les bourbs soient trop présentes. Une fois que le jus a été suffisamment macéré on passe au pressurage, puis, à la mise en amphore.
Utilisée pour vinifier, stocker et transporter le vin sous l’Antiquité, l’amphore a été petit à petit remplacée par des contenants plus modernes mais connaît aujourd’hui un renouveau auprès des vignerons. Un retour aux origines du vin qui offre aussi plusieurs avantages.
Au Mas de Rey, l’amphore en grès, façonnée à la main, trône désormais fièrement à côté des cuves en béton. À l’intérieur, le jus de Gewürztraminer commence désormais la phase de fermentation.
« De part sa forme, l’amphore présente l’avantage de garder les lies constamment en déplacement ce qui ajoute du gras et du volume au vin. C’est ce qu’on appelle le mouvement brownien. » explique l’oenologue Mathieu Ciampi. La perméabilité de l’amphore à l’oxygène permet aussi d’oxyder la couleur du vin, ce qui lui donnera d’ici quelques mois sa couleur orange.
Après une dizaine de jours d’élevage en amphore, le vin commence à trouver sa structure définitive ainsi que toute sa palette aromatique. Et à la dégustation, le résultat est saisissant : une couleur déjà nette, un nez expressif et des fragrances puissantes de fleurs, d’écorce d’orange, d’agrumes et quelques notes fumées. « Ça rappelle les champs de fleurs jaunes lorsqu’on se balade à la fin de l’été » évoque Marion. « On a laissé vivre le vin et l’amphore a fait le reste. Finalement ils avaient déjà tout compris » ajoute t-elle en évoquant le travail des premiers vignerons.
Résultat prometteur donc, et dont les défauts, comme la faible persistance aromatique, seront vite gommés par le temps d’élevage qui prendra plusieurs mois. Le vin gagnera aussi en volume et en souplesse et sera prêt pour la mise en bouteille.
Il ne restera plus qu’à trouver le nom de cette cuvée, dont on devine déjà le lien avec l’Antiquité. L’Histoire entre le Mas de Rey et nos ancêtres ne fait que commencer.